L’Entretien d’un orgue ( entretien courant )

SOMMAIRE :

entretien-orgue

 
 

Introduction

L’association Orgue en France est saisie par des collectivités, associations, organistes, affectataires, qui sollicitent son avis et son conseil pour l’entretien et la conservation des orgues. Conformément à l’article 2 de ses statuts, l’association est légitimée à répondre à ces demandes quelle que soient leurs provenances. Elle en a l’obligation statutaire lorsque celles-ci émanent de ses membres.

Un orgue à tuyaux est une œuvre d’art d’une grande valeur. Il s’agit d’un bien culturel présentant un intérêt du point de vue de l’histoire, de l’art, de de la science, de la technique. Il est indispensable de bien l’entretenir pour qu’il soit toujours en état de jeu, bien accordé, et conserve ses qualités et sa valeur durant de longues années.

Définition et objectif de l’entretien

Entretenir : « tenir en bon état, faire durer, maintenir en bon état ».
Maintenance : « ensemble des opérations permettant de maintenir un système, un matériel, un appareil, etc., dans un état donné, ou de lui restituer des caractéristiques de fonctionnement spécifiées ».
Appliqués à un instrument de musique, ces termes englobent une série d’opérations relevant d’une ou plusieurs personnes ayant les connaissances et les capacités à les effectuer. Il importe de rappeler que l’entretien d’un orgue a pour objectif qu’il soit accordé et donc juste, et qu’il soit opérationnel sur le plan de son fonctionnement.

Constat – Réflexions

Le maintien en bon état d’un matériel présuppose qu’au départ celui-ci soit en bon état. Par voie de conséquence l’entretien est distinct de la remise en état.

S’agissant d’un orgue l’entretien comprend à la fois l’accord des tuyaux ainsi que les opérations de réglages sur les transmissions.

Selon la nature, la taille, la facture de l’instrument les opérations peuvent être les plus diverses et plus ou moins longues (réglages mécaniques, vérifications d’étanchéité, vérifications et réglages de systèmes électriques, selon l’état des jeux d’anches, des rasettes, etc.).

A cela s’ajoutent les conditions climatiques et hygrométriques de l’édifice dans lequel se situe l’instrument, les variations qu’il subit du fait de son emplacement, les usages (ouverture des portes), et de nombreux autres paramètres qui varient au fil des ans.
La nature, la durée et la fréquence des interventions doivent donc être adaptées selon :

  • Les conditions climatiques (température, humidité, sécheresse), le type de chauffage et ses conditions d’utilisation, la pollution, la poussière.
  • L’importance de l’instrument.
  • L’état de l’instrument. Un instrument qui n’est pas au départ en bon état demandera plus de temps pour le maintenir en état de jeu et pour la tenue de l’accord. Il en est ainsi pour la tenue de l’accord des tuyaux si le matériel n’est pas en bon état.
  • La technologie de l’instrument (les opérations et leur fréquence diffèrent selon qu’il s’agit d’un instrument mécanique, pneumatique, électrique et selon la complexité de ses transmissions).
  • L’emplacement de l’instrument dans l’édifice et les usages du lieu (courants d’air, fréquence d’ouverture des portes, etc…). L’accessibilité à l’intérieur de l’instrument.
  • La fréquence d’ utilisation de l’instrument (un instrument insuffisamment utilisé pourra poser des problèmes car ses mécanismes seront peu mis en mouvement). il est dans l’intérêt de l’orgue qu’il soit joué régulièrement.
  • Les caractéristiques de la tuyauterie : facteurs d’orgues et organistes se rejoignent pour constater que les anches à corps raccourcis tiennent en général moins bien l’accord et nécessitent des accords plus fréquents.

Il ne saurait donc y avoir « un modèle unique » de contrat d’entretien, la nature de celui-ci, la fréquence et la durée des visites étant nécessairement différentes pour chaque instrument. Toutefois compte-tenu des différences de température en fonction des saisons, et quel que soit le type de chauffage de l’édifice ou l’absence de tout chauffage, il est considéré que l’entretien courant d’un orgue nécessite 4 visites par an au minimum.

Le public, les fidèles, les organistes ont droit à un orgue juste et opérationnel puisque que celui-ci est appelé à accompagner et contribue au maintien d’un patrimoine, au rayonnement culturel d’une collectivité, à la mise en valeur des œuvres du répertoire, etc.

Nature des opérations d’entretien

– Accord des jeux d’anches et de tuyaux à bouche

Chaque visite d’instrument comprend l’accord de tous les jeux d’anches et doit prévoir un temps suffisant pour la reprise de l’accord de tuyaux à bouche dont la liste aura été établie par les organistes sur le cahier d’entretien consacré à cet effet (voir plus loin « cahier d’entretien »). Si cette liste n’a pas été établie préalablement à la visite du facteur d’orgues, ce dernier doit prendre le temps de vérifier l’accord des tuyaux à bouche en essayant l’instrument.

– Entretien – Réglages

Comme indiqué plus haut, selon l’importance et la technologie de l’instrument, un temps suffisant doit être consacré aux réglages des transmissions. Lors d’une visite, plusieurs heures peuvent être nécessaires pour ces réglages, qui nécessitent parfois le démontage de certaines parties de l’instrument pour accéder aux points de réglages.

– Entretien – Autres opérations

Selon la nature de l’instrument, la spécificité ou la fragilité éventuelle de sa facture originelle, d’autres opérations, ciblées par le facteur d’orgues qui connaît l’instrument, doivent être effectuées régulièrement.

Rappelons encore que l’entretien courant ne peut compenser le mauvais état général, l’état de vétusté, la détérioration et l’usure au fil des ans, la faiblesse originelle d’un système délicat.

Qui doit assurer ces opérations ?

L’entretien des orgues relève de personnes hautement qualifiées en la matière.

Il importe de ne pas s’improviser accordeur ou réparateur d’orgue car des maladresses peuvent causer des dégâts irréversibles. Il faut éviter que des personnes inexpérimentées s’aventurent dans un orgue.

Des formules de délégation ou de sous-traitance peuvent être mises en place entre le facteur qui a construit ou restauré l’instrument et un facteur d’orgues de proximité. Elles peuvent être rendues nécessaires lorsqu’il s’agit d’une intervention urgente en raison de l’apparition brutale d’une avarie rendant l’instrument inutilisable ou en mise en service partielle.

Le cahier d’entretien

Il permet d’assurer le suivi de l’instrument ; il est l’outil indispensable au facteur d’orgues qui effectue l’entretien. Tenu par le ou les organistes du lieu, ce cahier est en permanence à proximité de l’orgue.
Chaque dysfonctionnement ou problème constaté (y compris lorsque ce problème disparaît de lui-même) y est consigné avec la date. De même y figure la liste des tuyaux à bouche désaccordés (jeux de fonds, mutations et mixtures).

Il est hautement souhaitable qu’avant chaque visite d’entretien le facteur d’orgues soit informé de la nature des dysfonctionnements qui se seraient produits depuis sa précédente visite.

A la fin de sa visite, le facteur d’orgues indiquera sur ce cahier la date et la durée de son intervention ainsi que la nature des opérations qu’il a effectuées. Il pourra aussi indiquer celles qu’il n’a pu réaliser lorsqu’elles nécessitent un travail plus important ne pouvant être assuré dans le cadre de la visite d’entretien. Ces indications permettent alors au propriétaire et aux utilisateurs de mesurer si des travaux doivent être envisagés ou s’ils peuvent être résolus dans le cadre de la prochaine visite d’entretien.

Le rôle des organistes

Pour ce qui concerne le culte catholique et ainsi que l’indique la charte des organistes validée par la Conférence des Évêques de France :

Par délégation de l’affectataire (cf Charte des organistes – CEF) :

  • L’organiste titulaire est responsable de l’instrument qui lui est confié ; en concertation avec l’affectataire, lui-même responsable de l’instrument à l’égard de l’autorité propriétaire, il fait en sorte que l’entretien et l’accord de l’orgue soient assurés ; il tient un cahier d’entretien, destiné au facteur d’orgue, sur lequel il signale tout dommage et toute anomalie de fonctionnement.
  • il est, en outre, responsable de son utilisation par des organistes adjoints ou visiteurs. Toute demande d’activité autour de l’orgue ne peut se faire qu’en collaboration entre l’affectataire et l’organiste.

La présence de l’organiste lors du passage du facteur d’orgues est plus que nécessaire. Au-delà des observations notées sur le cahier d’entretien, l’organiste donnera oralement tous les compléments d’information. A l’issue de la visite d’entretien, l’organiste, ou une personne qualifiée mandatée par le commanditaire des visites d’entretien, valide les opérations effectuées par le facteur d’orgues. Il est de l’intérêt du propriétaire, de l’affectataire dans le cas d’un édifice cultuel, et du facteur d’orgues lui-même, que soit attestée la visite du facteur d’orgues et la bonne exécution des opérations.

Cas particuliers des orgues protégés au titre des monuments historiques et des orgues appartenant à l’État

a) Orgues protégés au titre des monuments historiques

Qu’il s’agisse des orgues appartenant à l’État, aux collectivités territoriales, à une personne morale ou à une personne privée, la conservation, la surveillance, l’entretien des orgues protégés au titre des monuments historiques relèvent des services déconcentrés du ministère chargé des monuments historiques auxquels les techniciens-conseils agréés par l’État apportent leur concours, conformément au décret n° 2009-751 du 22 juin 2009 (articles 1, 2 et 3).

b) Cas particuliers des orgues protégés au titre des monuments historiques et des orgues appartenant à l’Etat

  • Orgues protégés au titre des monuments historiques

    Qu’il s’agisse des orgues appartenant à l’Etat, aux collectivités territoriales, à une personne morale ou à une personne privée, la conservation, la surveillance, l’entretien des orgues protégés au titre des monuments historiques relèvent des services déconcentrés du ministère chargé des monuments historiques auxquels les techniciens-conseils agréés par l’Etat apportent leur concours, conformément au décret n° 2009-751 du 22 juin 2009 (articles 1, 2 et 3).

  • Orgues appartenant à l’Etat, non protégés au titre des monuments historiques.

    Pour les orgues appartenant à l’Etat, non protégés au titre des monuments historiques, les techniciens-conseils agréés par l’Etat assurent, en liaison avec ces mêmes services, des missions de conseil et d’avis pour l’entretien des orgues appartenant à l’Etat (alinéa 5° de l’article 3 du décret précité).

    Par voie de conséquence, le contenu et les modalités des contrats d’entretien des instruments précités peut être proposé par des techniciens-conseils agréés. Conformément aux lois de séparation, l’orgue étant affecté au culte, il est légitime et nécessaire que l’affectataire (et les organistes agissant par délégation de celui-ci) soient associés à l’établissement des contrats d’entretien ainsi qu’au suivi de leur exécution. Il est par ailleurs indispensable que les affectataires et organistes soient informés par les services de l’Etat et par les techniciens conseils agréés des mesures que ces derniers estiment nécessaires à la conservation des orgues et au bon fonctionnement de l’instrument (alinéa 3° de l’article 3 du décret précité). Il y a lieu de rappeler que de nombreuses associations d’amis de l’orgue organisent des activités culturelles, compatibles avec l’exercice du culte, ce qui contribue au rayonnement de l’instrument et de la musique.

    La concertation entre les services de l’état et les utilisateurs (affectataires, organistes, associations) est donc primordiale. Elle est l’un des gages de la pérennité de l’instrument et de son maintien en bon état.

Organisation et financement de l’entretien

On rencontre de nombreux cas de figure :

  • Orgues appartenant aux communes : aux termes de la circulaire du Ministère de l’interieur du 29 juillet 2011 NOR/IOC/D/11/21246C l’entretien des orgues appartenant aux communes relève des propriétaires.
  • Orgues appartenant à l’Etat : l’entretien relève de l’Etat (Direction régionale des affaires culturelles).

  • Orgues appartenant aux associations diocésaines, associations cultuelles, associations loi 1901, l’entretien relève des propriétaires de ces instruments.

    Les propriétaires (collectivités, associations diocésaines, cultuelles ou privées) ne sont pas toujours suffisamment informés ou conscients de la valeur des instruments, de la nécessité d’un entretien régulier. Il importe de rappeler que les orgues sont des instruments précieux appartenant au patrimoine commun et méritent l’attention que l’on doit porter à toute œuvre d’art. A cet égard on s’assurera par exemple que l’orgue est inscrit à l’inventaire des biens immobiliers et mobiliers du propriétaire et on veillera à ce qu’il soit couvert par l’assurance du propriétaire.

Orgue en France recommande la mise en œuvre d’un contrat d’entretien annuel.

Celle-ci doit être précédée :

  • pour les instruments existants: d’un état des lieux, par le facteur d’orgues, le propriétaire et les utilisateurs, permettant de mesurer l’état général de l’instrument, son environnement immédiat, les objectifs et les conditions d’exécution de l’entretien ; il permet ainsi d’établir les objectifs (et les limites) de l’entretien.
  • pour les instruments en construction ou en restauration, avant l’attribution du marché: prévoir les modalités d’un contrat d’entretien en incluant la proposition dans le règlement de consultation (le montant H.T. pour une visite d’entretien sera reprécisé au cadre de la décomposition du prix général mais ce montant n’est pas intégré dans le montant de l’opération. Si cette prestation d’entretien est assurée dans un cadre financier différent elle est pour autant intégrée dans l’analyse des offres des candidats dans les critères de jugement. Une formule de sous-traitance en collaboration avec un facteur d’orgues proche du site peut être acceptée après la première année du contrat, en cas d’éloignement du constructeur et en vue d’optimiser les coûts d’entretien.)

Contenu du contrat

Comme indiqué dans les pages précédentes il est nécessaire de préciser la nature des opérations, le nombre d’heures prévues, les conditions d’exécution (en période hivernale est-ce que l’on accorde église froide ou église chauffée ?) et de mesurer les contraintes pour le propriétaire, l’affectataire, les utilisateurs, le facteur d’orgues, afin que l’ensemble des opérations puissent être menées dans les conditions optimales et dans les règles de l’art.

Distinguer clairement :
– le temps consacré à l’accord, en prévoyant un temps suffisant pour la reprise de tuyaux à bouche ;
– le temps consacré autres opérations.

Préciser ce que couvre la prestation :
– nature et durée de l’intervention ;
– coût du transport ;
– hébergement ;
– frais de repas, etc.

Prévoir des aléas :
Une fois établi le nombre d’heures consacré à l’accord et aux réglages, il est utile de prévoir un temps pouvant être consacré à des imprévus. Dans le cadre d’un contrat annuel avec plusieurs visites, ce nombre d’heures pourrait être annualisé (x heures/an).

Éviter toute formulation pouvant porter à confusion ou à contradiction.
À titre d’exemple le terme « forfaitaire » peut parfois provoquer des litiges.

Indiquer les contraintes
> pour le facteur d’orgues :

  • prévenir suffisamment à l’avance de son passage le propriétaire, les utilisateurs, le clergé ;
  • respecter les plages horaires d’intervention ;
  • prendre en compte les conditions de sécurité de l’édifice.

> pour le propriétaire et les utilisateurs :

  • convenir de la date de visite avec le facteur d’orgues suffisamment à l’avance ;
  • tenir à jour le cahier d’entretien ;
  • prévoir la présence de l’organiste lors de l’intervention du facteur d’orgues ;
  • prendre en compte l’éventuelle problématique du chauffage en période hivernale ;
  • fermer l’accès à l’intérieur de l’instrument.

Indiquer les périodes d’interventions et le délai de prévenance.
Compte-tenu des différences de température en fonction des saisons, et quel que soit le type de chauffage de l’édifice ou l’absence de tout chauffage, il est considéré que l’entretien courant d’un orgue nécessite 4 visites par an au minimum. Ce nombre pouvant être supérieur selon la particularité de l’environnement de l’instrument, de son état, de ses différents usages, etc.

Prévoir les demandes exceptionnelles et les situations d’urgence :

  • en cas de demande de visite supplémentaire, qui la demande, qui paye ?
  • en cas de dépannage d’urgence rendant l’orgue inutilisable ou en mise en service partielle, dans quel délai le facteur d’orgues s’engage à intervenir ?
  • en cas de délégation ou de sous-traitance à un confrère (prévoir au besoin cette éventualité).

Indiquer le mode de validation du travail effectué.

Prévoir qu’en cas de litige une personne qualifiée, agréée par le signataire du contrat et le facteur d’orgues, puisse établir une expertise.

 
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